Prendre Gloria

Dans la commune italienne de P., on sauve les apparences. Et surtout le dimanche. Le 12 septembre 1993 a dérogé à la règle. Ce jour-là, Gloria Prats quitte son amie Elena pour honorer un rendez-vous. Elle franchit le perron de l’église de la Miséricorde. Un rendez-vous furtif, pas plus de quelques minutes. Le 12 septembre 1993, les minutes deviennent des heures. Gloria ne ressort pas. Une fugue à coup sûr. Ou la manœuvre de ce petit Albanais trop discret pour être honnête. Tout, mais pas le principal suspect, protagoniste numéro 2 du rendez-vous : Damiano, rejeton gavé de Vittorino Solivo, collectionneur de mèches de cheveux dérobées aux jeunes filles et camarade de jeu à base de lames et d’urine. L’enquête peut commencer, sans corps, et les parjures, les alibis, et les non-dits qui se passent la balle tandis qu’à P., une poignée d’hommes et de femmes s’affrontent aux grands de ce monde. Car à P., quand une fille disparaît, les larmes et la colère d’un clan, l’indignation et l’équité ne peuvent rien contre l’ombre menaçante d’une soutane ou d’une robe de magistrat. Et si chacun est sommé d’avoir voix au chapitre, si chaque pierre vibre au rythme silencieux de Gloria, nul n’assure qu’il est encore temps de laver le chagrin des vivants. Cet espoir perdu, il reste celui des preuves et celui du jugement. Le 12 septembre 1993, les minutes sont devenues des heures et le temps un bourreau.